quinta-feira, 16 de outubro de 2008

Carta Aberta ao Presidente Sarkozy sobre os Acordos de Partenariado da União Europeia com os países ACP

Lettre ouverte à Monsieur Nicolas Sarkozy, Président de la République française, assurant la présidence de l’Union européenne, au sujet des Accords de Partenariat Economique avec les pays ACP.
Bruxelles, 15 Octobre 2008
Monsieur le Président de la République,

Dans le contexte de la présidence française de l’UE et de la remise récente du rapport de la députée Mme Christiane Taubira sur les Accords de Partenariat Economique (APE), nous souhaitons attirer votre attention sur les aspects les plus controversés des négociations en cours. Il est clair en effet que nos partenaires, ainsi que de nombreux acteurs européens, doutent de la capacité des APE à favoriser le développement des pays ACP. Allant complètement à l'encontre de leur vocation première, ces accords risquent d'ébranler les économies de ces Etats fragiles, qui ont peu à gagner puisqu'ils exportent déjà très librement leurs produits vers l'UE, mais qui seront bientôt soumis à la concurrence féroce des produits européens.
En dépit des signes clairs indiquant que la plupart des régions ACP n’étaient pas prêtes à signer en l’état de tels accords avant le 31 décembre 2007, des APE intérimaires ont été conclus à la hâte avec plusieurs pays ACP mis sous pression par la Commission européenne. En réponse aux protestations de plusieurs chefs d’Etat lors du Sommet UE-Afrique en décembre dernier, le Président de la Commission européenne M. Barroso s’était engagé à laisser ouverte la possibilité de réviser ces accords intérimaires. La même Commission européenne a fait marche arrière en indiquant que les APE intérimaires ne seraient révisés que dans l’optique de la conclusion d’APE complets (c’est-à-dire incluant notamment les investissements et les services).
La Commission européenne poursuit l’objectif de libéralisation des services et des investissements afin d’attirer dit-elle les capitaux nécessaires au développent de l’Afrique. Cependant, comme le révèle notamment le rapport d’ActionAid Touche pas à mon Poisson, la libéralisation des investissements en Afrique encourage les comportements prédateurs, mettant la pression sur les ressources naturelles sans apporter de perspective de développement durable (transfert de savoir-faire, création de richesses, progrès social). S'ils sont signés en l'état, les APE aggraveront la crise alimentaire en légitimant les pratiques actuelles sans résoudre, bien au contraire, le problème de la fuite des capitaux hors du continent africain.
La crise alimentaire qui frappe de nombreux pays montre qu’une agriculture essentiellement orientée vers les exportations, aux dépens de l'agriculture vivrière, rend ces pays dépendants des marchés internationaux et vulnérables à leur extrême volatilité. Le rapport Taubira insiste sur la spécificité des produits agricoles qui ne sont pas des marchandises comme les autres, et sur la nécessité de promouvoir le Droit à l’alimentation, droit inscrit dans la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, la Convention internationale relative aux droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que plusieurs autres traités et conventions internationales. En introduisant le principe d'exclusion de 20% de produits de la libéralisation, les APE ne sont pas satisfaisants, car ils incitent les pays ACP à choisir entre protéger leurs échanges commerciaux ou assurer la sécurité alimentaire de leur population.
Au contraire, affirmer la primauté du droit à l’alimentation dans les APE permettrait aux pays ACP de développer des outils de protection de l’agriculture afin de respecter ce droit fondamental. Cela contribuerait enfin à donner davantage de cohérence aux politiques européennes d’aide au développement, de commerce et de promotion des droits de l’homme.
A cet égard, les recommandations formulées dans le rapport remis par Mme Taubira vont dans le bon sens. La présidence française de l’UE doit impérativement ouvrir la voie à la formulation d’alternatives aux APE remettant au centre des accords la priorité au développement et au respect des droits sociaux, économiques et culturels. La recherche de solutions alternatives aux APE est de fait prévue par l’article 37.6 de l'Accord de Cotonou.
Concernant le processus de négociation, la révision des APE intérimaires ne devrait pas être conditionnée à la négociation d’APE complets ; les APE intérimaires signés avec certains pays ne sauraient être l'unique base pour la négociation d’accords régionaux ; les pays et les régions souhaitant renégocier les APE intérimaires devraient être autorisés à le faire ; enfin, des négociations en vue de la conclusion d’APE complets ne devraient être engagées qu’avec les pays qui en feraient la demande.
Nos partenaires ACP attendent des clarifications politiques sur les nombreux malentendus qui ont entaché le processus de négociation des APE depuis son origine. Cette démarche doit faire l'objet d'un dialogue politique au plus haut niveau, dans le cadre d'un Sommet UE - ACP.
Nous comptons sur la Présidence française pour lancer une initiative de cet ordre.
Monsieur le Président, nous vous demandons de prendre en considération les remarques ci-dessus, afin de garantir que la poursuite des négociations avec les pays ACP, tant pour les APE complets que pour les accords intérimaires, se fera dans le plein respect de nos partenaires et au service de leur développement.

Kader ARIF (PSE, FR)
Vittorio AGNOLETTO (GUE/NGL, IT)
Margrete AUKEN (Verts/ALE, DK)
Marie-Arlette CARLOTTI (PSE, FR)
Proinsias DE ROSSA (PSE, IE)
Harlem DESIR (PSE, FR)
Ana GOMES (PSE, PT)
Alain HUTCHINSON (PSE, BE)
Mikel IRUJO AMEZAGA (PSE, ES)
Caroline LUCAS (Verts/ALE, UK)
Helmut MARKOV (GUE/NGL, DE)
David MARTIN (PSE, UK)
Luisa MORGANTINI (GUE/NGL, IT)
Pasqualina NAPOLETANO (PSE, IT)
Catherine NERIS (PSE, FR)
Pierre SCHAPIRA (PSE, FR)
Carl SCHLYTER (Verts/ALE, SE)
Bart STAES (Verts/ALE, BE)
Søren Bo SØNDERGAARD (GUE/NGL, DK)
Anne VAN LANCKER (PSE, BE)